À Athènes, le Centre Pedro Arrupe au service des enfants les plus pauvres
À Athènes, le Centre Pedro Arrupe assure le soutien scolaire d’enfants issus de familles immigrées ou réfugiées et contribue à leur intégration. Argyro Hatziantoniou, sa directrice, revient sur 14 années d’existence fertile de ce lieu pour les jeunes accueillis et pour elle-même.
Le Centre Pedro Arrupe accueille aujourd’hui 192 enfants de 22 nationalités différentes, âgés de 6 à 18 ans, de l’école primaire au lycée. Notre objectif est d’aider les élèves dans leurs devoirs scolaires et, en même temps, de les intégrer dans la société grecque en leur apprenant à mieux connaître la culture, les coutumes et les traditions du pays.
Il y a 14 ans, le P. Petros Hong, jésuite, a décidé de créer un lieu où les enfants se sentiraient comme dans une seconde maison et où ils recevraient l’aide, l’attention et les soins dont ils ont désespérément besoin. En 2009, la crise économique a frappé de plein fouet de nombreuses familles grecques, créant toute une série de problèmes sociaux, psychologiques et financiers. En 2015, nous avons connu la crise des réfugiés : un million et demi d’entre eux, dont des enfants mineurs, tentaient d’atteindre notre pays de diverses manières pour échapper à la guerre ou pour trouver une vie meilleure. Au milieu de ces crises successives, le Centre Pedro Arrupe a été fondé pour aider les plus vulnérables, c’est-à-dire les enfants les plus touchés. C’était comme une arche dans le déluge de crises qui noyait la société grecque.
« Avance en eau profonde » (Lc 5,4)
Je me souviens encore très bien de ce jour pluvieux où, avec le P. Petros et deux jeunes volontaires, nous installions des tables et des chaises pour accueillir les enfants pour la première fois. Je dois avouer que, lorsque le Père m’a dit ce qu’il voulait faire, je me suis dit que ça n’allait pas marcher, que c’était de la folie. Je ne l’ai pas vu douter un seul instant. Il était tellement sûr de ce qu’il faisait qu’il me disait souvent : « Si cette œuvre est ce que Dieu veut, alors, quoi qu’il arrive, personne ne pourra l’arrêter. S’il s’agit d’un simple désir humain, il n’ira pas loin. » Je ne sais pas s’il a vu quelque chose que d’autres n’ont pas vu. Mais cette attitude de foi m’invitait moi aussi à avancer dans des eaux plus profondes, comme l’a fait saint Pierre à l’appel du Christ, en faisant confiance à Dieu sans savoir où j’allais. Le premier jour, nous avions 14 enfants, après une semaine 24, après un mois 34, à la fin de l’année scolaire 60…
Fécondité de la mission
Au cours de ces premiers mois, j’ai vraiment vécu ce que dit l’Évangile, la fécondité du Seigneur, la fécondité de la mission, la multiplication de la bénédiction de Dieu. C’était comme si les enfants ou les parents venaient guidés par Dieu qui les prenait par la main. Je l’ai ainsi perçu et j’ai souvent ressenti une grande gratitude envers le Seigneur pour cette œuvre qui m’a fait participer et témoigner de sa grâce.
À un autre moment de ma vie au Centre, lorsqu’on m’a demandé de prendre la direction parce que le P. Petros devait partir à l’étranger pour son troisième an, je suis tombée des nues parce que je ne savais pas si j’y arriverais : nous avions alors 138 enfants, quatre enseignants et des bénévoles. Ce projet avait pris une ampleur qu’on n’aurait jamais imaginée il y a quelques années. Le plus dur, c’est que j’ai dû remplacer non pas n’importe qui, mais le fondateur ! Vous savez qu’il n’est pas facile de remplacer un jésuite ! Pourtant, au milieu de ces inquiétudes et de ces doutes, j’ai prié Dieu et j’ai ressenti une paix dans mon cœur qui a chassé toute anxiété en moi, quelque chose que je n’aurais pas pu provoquer par moi-même. La paix s’est ensuite transformée en consolation, et la consolation en créativité. Je me suis souvenue que, dans le discernement des esprits, selon saint Ignace, la paix est un signe qui vient de Dieu. J’ai donc accepté ma nouvelle mission et je suis repartie vers des eaux plus profondes.
Enfin, le Centre Pedro Arrupe n’a pas seulement été un lieu d’apprentissage pour les enfants, mais aussi pour ma propre formation à la foi. Ce n’était pas uniquement une arche pour les élèves, mais aussi la mienne, qui m’a appris à ne pas me noyer dans mes peurs. C’est un environnement, ou plutôt un esprit, où les enfants et les adultes apprennent à devenir vraiment eux-mêmes. Grâce à la confiance que m’a accordée la Compagnie de Jésus, j’ai pu apporter ma petite pierre au Centre, devenir une petite cofondatrice et une toute petite disciple du Christ.
Argyro Hatziantoniou,
directrice du Centre Pedro Arrupe à Athènes
La pédagogie mise en œuvre
Apprendre aux enfants à travailler ensemble sans considération de leur couleur de peau, de leur race et de leur religion mais toujours dans un esprit de solidarité et de paix, tel est l’objectif du Centre Pedro Arrupe. Ils peuvent ainsi développer leurs relations interpersonnelles de manière harmonieuse, apprendre et appliquer le concept de respect des autres êtres humains. Ils sont aussi amenés à se connaître eux-mêmes à travers des activités créatives, telles que la musique, le théâtre, la danse, l’artisanat, les langues étrangères. Ouvert en après-midi du lundi au vendredi, le centre a été intégré à JRS-Grèce (Jesuit Refugee Service), ce qui a permis de financer quatre professeurs salariés aidés de plusieurs bénévoles. Son fonctionnement repose sur la générosité de ses bénévoles et sur les dons.
> En savoir + via la Fondation de Monchteuil (JRS Ellada)
Cet article a paru dans la revue Échos jésuites (été 2024), la revue trimestrielle de la Province d’Europe Occidentale Francophone. L’abonnement numérique et papier est gratuit. Pour vous abonner, cliquez sur ce lien.