P. Pierre Maurel (14.06.2024)

Pierre Maurel Pierre était un homme courageux, touché très vite par une surdité croissante, d’une foi très solide, au regard pénétrant et malicieux qui faisait son charme. Né en 1927, six années après sa sœur Bernadette, et cinq avant son autre sœur Arlette, il restera très proche d’elles tout au long de sa vie.

Après sa naissance marseillaise, Pierre habite à Issy-les-Moulineaux, Vanves, Deauville, Aix-en-Provence puis Paris où il passe les deux bacs de lettres et philosophie en 1944 et 45 à Louis-le-Grand. Ensuite, une année de lettres à la Catho de Paris, et c’est l’entrée au noviciat de Laval le 28 octobre 1946. En 1959, il suit le cursus traditionnel en philosophie, en théologie. Il est ordonné prêtre à Lyon en 1959 puis fait son Troisième An en 62-63 à Saint-Martin d’Ablois. Entre deux, Pierre, déjà sensibilisé à la vocation missionnaire, découvre l’Afrique à Douala comme enseignant de philo aux élèves de terminale. Ce n’est pas la brousse ! Mais il prend ce qu’on lui donne, comme il le fera toute sa vie, pour servir son Dieu et les hommes. C’est le début d’une vie africaine. Il enseigne la philo à Otélé (pour Camerounais, Tchadiens, Gabonais, Congolais) puis à Nkol Bisson de 63 à 79. C’est une période riche en rencontres et découverte progressive de l’Afrique qui se termine en enseignement itinérant de 79 à 81 à Kinshasa et Ouagadougou.

Survint alors une mission qui lui fait peur, car il pense ne pas en être digne, la charge de Maître des novices de la PAO. Mais il l’accepte et la remplira au mieux, dans un lieu très pauvre (ni eau, ni électricité) et à l’abandon. Nkaobang au Cameroun, choisi pour cela par le P. Maître, Jean-Noël Crespel, auquel allait succéder Charles Vandame. Celui-ci, nommé à N’Djamena comme évêque, part en 81 et Pierre prend sa suite. En 84, le noviciat rejoint un lieu un peu plus habitable, Bafoussam, où il reste jusqu’en 88. La difficulté de ces années est d’allier le respect des traditions locales et la rencontre avec la tradition de la Compagnie. Maillage difficile et passionnant.

1989 sera une année de transition entre le maître des novices et l’instructeur du Troisième An que devient Pierre deux années de suite. Là aussi, il ne s’en sent pas trop capable mais il fait confiance au Provincial Éric de Rosny et à l’Esprit Saint pour l’accompagner dans cette nouvelle aventure, une nouvelle occasion de vivre la foi en Celui qui L’accompagne : aider des religieux déjà expérimentés à « faire le pas », à s’engager radicalement dans la mission du Christ, dynamisés par l’Esprit, à la gloire du Père. » À cette occasion, Pierre a la joie d’emmener les tertiaires en Israël, et, du Nord au Sud, il découvre avec eux le pays de ce Jésus qu’ils ont voulu suivre.

1990-1998 : retour à la philosophie, comme professeur à plein temps à Kimwenza à l’Institut Pierre Canisius en RDC ; avec des pères belges, rwandais et autres… Une ambiance très sympathique. Mais c’est aussi une période très dure en raison de la chute de Mobutu, de l’évolution des Congos et du génocide du Rwanda ! Avec les années 2000 arrive une orientation nouvelle, au service interne de la Province, comme archiviste et secrétaire, aux côtés du Provincial. Hormis une interruption d’une année à Grenelle pour raison de santé, Pierre sert la Province d’Afrique de l’Ouest jusqu’en 2016.

Dans tout cela, beaucoup de joies. Avec Charles Vandame, il peut dire : « Ce ne sont pas elles qui m’ont maintenu debout, ni qui m’ont permis, dans les moments difficiles, de rester debout. Il y a une autre joie plus solide, d’une toute autre nature, une joie qui vient de l’Esprit Saint : joie d’être fils de Dieu, aimé du Père ; certitude que, par-delà mes insuffisances et infidélités, je suis et reste aimé ». Cette force intérieure a porté Pierre tout au long encore de son séjour à la Maison Saint-Jean, en dépit de sa dépendance pour les déplacements et de sa surdité qui l’isolait beaucoup. Mais le sourire malicieux et la foi profonde n’étaient jamais très loin.

Qu’il en soit remercié, que le Seigneur en soit remercié !

P. Michel Roger sj,
communauté Notre-Dame à Lille (Stations)

Article publié le 14 juin 2024

Aller en haut