La formation jésuite aux frontières et au cœur du monde

Pour aider les jeunes jésuites à « se tenir aux frontières » tout en « demeurant au cœur de ce monde », la Compagnie de Jésus veut offrir une formation intégrale qui se déploie dans le temps. Le P. Xavier Nucci sj, délégué du Provincial pour la formation, en détaille les étapes et présente sa communauté.

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Colombie, Belgique, Inde, France, Canada : la diversité des visages et des origines à la communauté Saint-Pierre Favre

En 2008, le pape Benoît XVI s’adressa ainsi à la Compagnie de Jésus : « L’Église a un besoin urgent de personnes à la foi solide et profonde, dotées d’une bonne culture et d’une vraie sensibilité humaine et sociale, de religieux et de prêtres qui consacrent leur vie à se tenir aux frontières pour témoigner et aider à comprendre qu’il existe une profonde harmonie entre foi et raison, esprit évangélique, soif de justice et engagement pour la paix. (…) C’est à cela que la Compagnie de Jésus doit se consacrer en priorité. » Cet appel à l’exigence dans la formation fut entendu de manière très consolante, notamment par les compagnons en charge de la formation. Aujourd’hui, cet appel s’inscrit dans un monde toujours plus complexe, marqué par de nombreuses questions sociales et environnementales : écologie intégrale, bioéthique, inégalités croissantes…

Une formation intégrale

Cette exigence (entendue comme excellence ou magis) de formation requiert du temps. Aussi, plus que jamais, la Compagnie de Jésus veut donner les moyens, à ceux qui la rejoigne, de bénéficier d’une formation longue entre l’entrée au noviciat et la fin du « Troisième An ». Ces années (entre 13 et 15 ans) sont découpées en plusieurs étapes. La période de formation intellectuelle, en vue de l’ordination, dure sept ans au total : après les deux années de noviciat, le jeune jésuite effectue un premier cycle de cinq ans, en philosophie et théologie. Durant ce temps, des « activités apostoliques » le mettent en contact avec des réalités sociales très diverses ; elles lui sont proposées pendant l’année universitaire et les périodes de congés. À l’issue de ce premier cycle d’études, la régence lui permet de vivre, durant deux ans, une longue expérience de terrain – dans un collège, une école d’ingénieurs, une activité sociale… – dans notre Province ou à l’étranger. La régence est suivie d’un deuxième cycle de théologie (éventuellement de philosophie). L’ordination diaconale prend place à la fin de ces deux années, suivie par l’ordination presbytérale (pour les prêtres), avant l’envoi pour la première mission apostolique.

Cette formation vise à être le plus possible « intégrale » en ce qu’elle concerne toutes les dimensions de la personne (spirituelle, affective, sociale, intellectuelle, physique…).

Une formation ouverte sur le monde

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Temps d’étude à la communauté Saint-Pierre Favre à Paris © Xavier Léonard sj

Depuis les origines de la Compagnie de Jésus, le temps de la formation a été voulu comme un moment ouvert à l’international. Aujourd’hui, plus que jamais, les jésuites ont l’opportunité d’effectuer tout ou partie de leur formation dans un autre pays. Actuellement, pour 41 jésuites en formation et membres de la Province d’Europe occidentale francophone, 93 compagnons originaires de 38 autres Provinces sont accueillis pour poursuivre leurs études, principalement à Paris, mais également à Namur et à Louvain-la-Neuve.

Cette formation vise aussi à favoriser davantage l’intégration dans le monde, l’Église et la Compagnie de Jésus. La plupart des jésuites entrent après de longues études et des activités professionnelles et bénévoles, où ils ont mis à profit leurs compétences. Il est donc essentiel de tenir compte de ces expériences pour faire en sorte que le compagnon puisse être le premier acteur de sa formation, par le discernement de ce qui peut le mieux l’aider à avancer sur son chemin personnel.

La communauté jésuite Saint-Pierre Favre à Paris rue Blomet

En région parisienne, une dizaine de communautés accueillent des jésuites pour le temps des études. Parmi elles, la maison de la rue Blomet, la communauté Saint-Pierre Favre, qui fêtera ses cinquante ans le 8 mai 2021. Située dans le sud de Paris, elle est composée de onze prêtres « formés » et de vingt-cinq scolastiques en premier cycle d’études, originaires de onze Provinces différentes. Cette diversité de parcours, d’âges (entre 24 ans et 89 ans) et de cultures est une grande richesse. Elle nous aide à sentir combien c’est un même désir d’ »aimer et servir » qui nous met ensemble, unis dans une volonté commune de nous tenir « au cœur de ce monde », selon les mots du poète jésuite Didier Rimaud.

Xavier Nucci P. Xavier Nucci sj
Supérieur de la communauté jésuite Saint-Pierre Favre,
à Paris

Témoignage

Benoit Thevenon « La formation que la Compagnie de Jésus nous offre à Paris est, clairement, une formation intégrale. La configuration de nos communautés faisant cohabiter des jésuites formés avec des scolastiques me semble très pertinente. Par la présence de nombreux compagnons étrangers, une inculturation française et, en même temps, une réelle expérience internationale, nous sont offertes. Cet ancrage à Paris offre de multiples atouts, notamment la possibilité de trouver de nombreux lieux d’activités apostoliques dans des domaines variés (présence auprès de jeunes, de migrants, de personnes en prison…). De même, en étant à Paris, nous sommes soumis à toutes les tentations et distractions que le monde peut nous offrir. Il me semble que cette ‘mise à l’épreuve’ est salutaire ». 
Benoît Thevenon sj, étudiant (scolastique) à l’Université Grégorienne à Rome, après deux années de premier cycle au Centre Sèvres et en communauté rue Blomet.

Cet article a paru dans la revue Échos jésuites (hiver 2020), la revue trimestrielle de la Province d’Europe Occidentale Francophone. L’abonnement, numérique et papier, est gratuit. Pour vous abonner, merci d’envoyer votre mail et/ou votre adresse postale à communicationbxl [at] jesuites.com.

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