Journée mondiale du migrant et du réfugié : récit d’expériences au JRS d’Athènes
Dimanche 29 septembre aura lieu la 105ème journée mondiale du migrant et du réfugié. A cette occasion, Laurent Salmon-Legagneur, scolastique jésuite, partage son expérience d’un mois au sein du JRS (Jesuit Refugee Service) à Athènes.
Comme beaucoup d’entre nous, je ne connaissais que de manière relativement abstraite et théorique la vie des réfugiés qui arrivent en Europe. Au-delà des passions médiatiques et des discours idéologiques, le mois que j’ai passé au service du JRS d’Athènes fut donc une expérience fondamentale pour entrevoir la réalité de la vie de ces hommes, de ces femmes, de ces enfants, qui ont fui des situations dramatiques dans leur pays.
Evidemment, un mois est vite passé. Mais le fonctionnement du JRS d’Athènes permet de s’intégrer rapidement. Dès la première semaine, j’ai pu me familiariser avec les différents lieux de service qui offrent tous la possibilité d’une rencontre très concrète avec les réfugiés. J’ai particulièrement apprécié d’être présent au « Tea-Time », lieu convivial ouvert chaque après-midi, où beaucoup de réfugiés iraniens et afghans viennent boire un thé tout en jouant aux cartes ou aux échecs.
Apprentissages pour petits et grands
Un autre lieu réjouissant fut notre centre de formation « Magistories », où des cours de grec, d’anglais, de français et d’informatique sont proposés. Sans être une école de langue, le système mis en place permet un suivi précis de la présence et de la progression dans l’apprentissage. Y tenant souvent la permanence d’accueil, j’ai été impressionné de voir combien des migrants d’horizons très divers sont intéressés par les cours que nous proposons. Pour beaucoup c’est une manière de montrer concrètement leur désir de s’intégrer dans l’une ou l’autre culture européenne. Mais c’est aussi pour beaucoup une heureuse stimulation intellectuelle dans un quotidien souvent marqué par l’incertitude, l’extrême lenteur des procédures administratives et l’ennuyeuse répétition de journées sans travail.
Avec les enfants, l’enjeu n’est évidemment pas le même. En sus du système scolaire qu’ils sont tenus de fréquenter par ailleurs, nous leur proposons l’après-midi du soutien en grec et des activités manuelles (peinture à l’eau, origamis, legos). Pendant l’été, la venue de volontaires supplémentaires permet de leur proposer aussi des activités ludiques et manuelles chaque matin pendant quelques semaines. Il était frappant de voir combien la vitalité dans enfants, quand elle était bien accompagnée, rejaillissait agréablement sur l’ambiance générale de toutes les activités du JRS.
Faire renaître un climat de confiance et de dialogue
J’ai aussi été très agréablement surpris par le « Magazi », local de redistribution de vêtements donnés au JRS pour les réfugiés. Ces derniers mois, suite à un gros travail d’organisation, le « Magazi » s’est peu à peu structuré et transformé en un espace qui ressemble à n’importe quel magasin de vêtement. Dernière nouveauté en date : la cabine d’essayage !
Certes, tous ces services peuvent sembler bien insignifiants devant l’énormité des rouages politiques et économiques qui pèsent si lourdement dans la vie des réfugiés. Pourtant, c’est autour de tels moments conviviaux et de petits services rendus que j’ai pu vivre de véritables rencontres. C’est alors qu’un terrain de confiance et d’amitié naît doucement, qu’un dialogue profond peut s’amorcer. On devient ainsi témoin de la dignité et de la pauvreté de ces gens qui vivent l’épreuve de l’exil et du réenracinement dans des conditions extrêmement difficiles. Je crois que ce n’est vraiment qu’ainsi que le courage de chacun peut renaître, que l’on peut choisir de lutter ensemble contre certaines des forces déshumanisantes qui sont à l’œuvre dans la vie des réfugiés aujourd’hui.
Article publié le 27 septembre 2019