Edouard Guignard Édouard ! Que dire d’autre que ce qu’a signifié la présence à ses obsèques d’une population originaire d’Asie, d’Afrique, de différents pays d’Europe, entourant sa famille et ses frères de la Compagnie ?

Comment se contenter de rappeler sa naissance le 23 juillet 1935 à Allonne dans les Deux-Sèvres… « Qu’elle était belle, cette ferme de l’Hôpiteau, dans ce beau pays de Parthenay, sous la protection d’Élise et Hilaire », et les années de Secondigny, Bressuire et Montmorillon … ! Toute sa vie d’enfant et de jeune homme a été marquée par son désir de vie donnée.

Quoi d’étonnant ainsi, qu’après le service militaire et six ans de travail comme comptable, Édouard ait désiré répondre de manière radicale à l’appel de Jésus-Christ et de se laisser entraîner rapidement vers les plus pauvres ! Le voilà au noviciat à Aix-en-Provence en 1963, puis au juvénat, puis adjoint à l’économe de Saint-Sébastien-sur-Loire.

En 1969, nous le retrouvons à Toulouse au service de la communauté, économe, sous-ministre, ministre en 1973. Il fait son Troisième An en 1977 et vit un bref retour à Toulouse. C’est là qu’un changement décisif va permettre à Édouard de donner toute sa mesure ; il explique lui-même : « Le P. René BERNARD est venu me chercher à Toulouse pour l’aider à Avignon. Pendant dix-sept ans, j’ai travaillé en accueillant (au « 68 » – rue des Lices) des demandeurs d’asile, au début surtout des « boat people vietnamiens », et ensuite, avec le P. BERNARD, le monde des gitans. »

Véritable âme du « 68 », Édouard a donné à cette maison d’accueil son style, sa chaleur et sa convivialité. C’est par lui que l’institution tenait : Édouard était toujours présent pour répondre aux nécessités, mais aussi pleinement engagé dans les travaux d’entretien et de rénovation des locaux de l’association.

Un neveu témoigne : « Je partais avec Édouard, dans son vieux break blanc ; il fallait attendre une à deux minutes que le moteur diesel chauffe avant de démarrer. Édouard en profitait pour faire une prière. Il était comme ça, Édouard, il ne perdait jamais de temps… Parfois, nous prenions deux ou trois repas dans la soirée, souvent des soupes dans des restaurants asiatiques… Édouard ne disait jamais non, il était heureux d’être en contact avec eux. Je me dis que c’était sûrement sa plus belle récompense. »

Un jour, il faut quitter Avignon, et nombreux seront ceux qui en souffriront : ils voient partir un frère, quelqu’un qu’on ne remplace pas. Toutefois Édouard est envoyé à Saint-Étienne pour demeurer au service des plus pauvres : il travaille avec les nouveaux immigrants, africains, roumains, albanais, arméniens, kosovars… et la création de l’ASIM… Années fécondes pour les pauvres… Édouard reçoit le surnom de « l’Abbé Pierre de Montreynaud » et est honoré par la ville – il reçoit la médaille d’or de la ville –, et par ses amis ! 200 couverts !

Tout a une fin, pourtant, sauf la charité, et nous l’avons retrouvée à La Chauderaie où les ennuis de santé de notre « Frère » l’ont conduit. Pendant ces mois de présence ici, Édouard est resté pleinement lui-même ; aussi aujourd’hui 28 janvier, en communion avec tous ceux qu’il a accompagnés, ensemble nous lui disons « Merci »

Michel ROGER sj