F. Henri CHALON (24.07.2020)
Henri CHALON a fréquenté les jésuites depuis sa quatorzième année, travaillant à partir de 1940 au Collège de La Joliverie, employé à des tâches de vie domestique et d’entretien. Il était né à Nantes, le 11 janvier 1926 ; c’est aussi à Nantes qu’il avait été baptisé. Il a grandi à Legé, dans une famille qui est devenue sa famille : une sœur, deux frères, auxquels il est resté très attaché. Legé, sud de la Loire Atlantique, nord de la Vendée, c’est la « Vendée militaire », dont il se revendiquait avec fierté : on ne pouvait pas se dire vendéen si on n’était né que sur les marges ! Legé, La Joliverie, « des endroits, où le travail était très dur ».
En 1943, il entre au noviciat à Laval, dans la « stricte observance » et non la « triste observance », selon la formule d’un vieux père, qu’il aimait rappeler. Après ses premiers vœux, il demeure à Laval, contribuant aux travaux généraux de la maison. Ses obligations militaires accomplies, retour à Laval – avec un temps de formation en menuiserie à La Joliverie – il intervient comme formateur à l’École apostolique du lieu, le Petit Bazar.
En 1955, il est nommé à Clamart, au Centre Spirituel de Manrèse. Il y vivra treize ans, en y exerçant les fonctions d’« homme à tout faire ». Au voisinage heureux de compagnons qu’il admire comme le P. GOUVERNAIRE. En 1958, il y prononce ses derniers vœux de « coadjuteur temporel ».
En 1968, il est envoyé à Marseille pour travailler avec les jésuites en mission ouvrière à La Busserine. Il participe à la vie du quartier et à l’animation de la Chapelle Sainte-Claire dont les compagnons ont la charge. C’est un service pastoral dans le cadre diocésain, avec notamment le catéchisme pour les enfants et leurs parents.
Et en 1974, le diocèse lui demande de travailler à l’aumônerie des gitans. Le voilà pour de nombreuses années au service des « Boumians et Voyageurs ». Avec un point d’ancrage à Marseille, dans des habitats adossés à des locaux paroissiaux, Saint-Henri, Saint-Jean-Baptiste, qui lui permettent d’accueillir ses « paroissiens ». Avec une voiture aménagée en quasi roulotte, qui va l’emmener bien au-delà des Saintes Maries pour le pèlerinage annuel, bien au-delà de la région, vers l’Espagne ou vers d’autres contrées, pour y visiter des familles. Ses compagnons à Marseille ont eu le bonheur d’être témoins de relations fortes tissées dans la fidélité. Gitan avec les gitans – on ne pouvait se tromper –, Henri leur a consacré sa foi et son énergie. Son travail pastoral s’accompagnait d’observations et de documentation, de notes prises minutieusement pour les compléter. À son départ de Marseille, ce patient travail a été recueilli par le Centre de ressources documentaires du MuCEM, qui aura un « fonds Henri Chalon ».
« Frère » dans la Compagnie, Henri se présentait parfois comme le gardien vigilant d’une espèce menacée. Il lui arrivait d’évoquer ce que son chemin avait connu de rude dans des situations où le « domestique » semblait l’emporter sur le « Frère », mais il savait aussi célébrer toute la richesse et la spécificité d’une voie qu’il pensait essentielle à la Compagnie, tant de belles choses en sa vie. Et il se réjouissait de ce que d’autres empruntent cette voie, même si la forme qu’ils lui donnaient n’était pas exactement celle qu’il avait connue. Un des derniers moments où nous l’avons vu rayonnant, c’était à la Saint Alphonse 2019 : il rencontrait un jeune jésuite qui venait de prononcer ses premiers vœux de Frère.
Christian BARDET sj
Article publié le 18 septembre 2020