Au noviciat : la rencontre du féminin et du masculin

S’ampute-t-on de l’autre moitié du genre humain lorsque l’on fait le choix de la vie religieuse ? Un jésuite vit-il en dehors de toute relation au féminin ? Qu’en est-il de la question de la sexualité ? Le P. Thierry Anne sj, maître des novices à Lyon, et Corine Robet, de la Communauté de Vie Chrétienne en France (CVX), répondent à ces questions pour la revue Vie chrétienne.

noviciat La famille ignatienne en France peut se réjouir de bénéficier d’un inter-noviciats fructueux et pétri de simplicité qui mêle novices hommes et femmes. Depuis plus de quarante ans, nos Supérieurs majeurs ont décidé qu’une part de la formation initiale à la vie religieuse se vivrait sous forme de temps communs plusieurs fois dans l’année. Rapidement, un pôle lyonnais et un pôle parisien se sont dessinés avec des ateliers-séminaires hebdomadaires ou bimensuels en local ; plus récemment des sessions plus longues se sont ajoutées au niveau national.

Une réflexion me vient à propos des retombées de cette mixité autour des trente jours des Exercices spirituels qui ont lieu en milieu de première année. Les fantasmes, attractions sexuelles, jeux de séduction, craintes de prise de pouvoir sauvage, distractions lancinantes, préjugés sexistes peuvent habiter les novices hommes ou femmes au long de ce compagnonnage, même en ces lieux et moments si denses.

Cependant, je note que les trente jours que nous vivons ensemble se déroulent très paisiblement et avec grande joie. Les novices en sortent unis par le cœur et la prière, au point d’envisager dans la suite des débats parfois contradictoires ou des relations apostoliques voire amicales, avec enthousiasme. J’en attribue l’origine à deux raisons. La première est que les novices sont entrés en connaissance par la parole échangée, au cours des sessions d’inter-noviciats qui ont précédé les trente jours. Au long du premier trimestre (et plus tard aussi), les novices se racontent une part de leur chemin vocationnel, partagent autour de livres bibliques, travaillent le Récit d’Ignace de Loyola, réfléchissent à haute voix autour des différentes composantes de la vie religieuse, etc. Ces paroles échangées ont en amont construit une connaissance réciproque. La seconde raison se trouve dans ces longs temps de prière silencieuse et liturgique côte-à-côte, au long de la grande retraite.

Il est clair que les novices, hommes et femmes, viennent là pour contempler leur Seigneur. Tous regardent dans une même direction qui est transcendantale, envisagent un genre de vie original et qui reçoit peu de soutien aujourd’hui. Il est ainsi une fraternité dans le Seigneur qui se constitue lentement, au rythme de Dieu. Nous pourrions ajouter par ailleurs que ces jeunes adultes sont accompagnés, animés et enseignés par des formateurs qui travaillent en équipe mixte.

Ainsi le dialogue authentique qui s’est engagé permet que les projections fantasmatiques sur l’autre sexe n’aient pas de prise. Connaître l’autre, avoir échangé, c’est apprendre à le respecter pour ce qu’il est, sans chercher à mettre la main sur lui. Parole et prière deviennent gages d’une relation pleine.

P. Thierry Anne sj, maître des novices à Lyon,
en collaboration avec Corine Robet, de la Communauté de Vie Chrétienne en France (CVX), intervenante au noviciat

> Source : revue Vie chrétienne, n°63, janvier 2020

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Article publié le 3 février 2020

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