Discours du P. François Boëdec sj pour la pose de la première pierre du Centre Teilhard de Chardin à Saclay

Le 9 septembre 2021, la première pierre du Centre Teilhard de Chardin a été posée. Situé sur le plateau de Saclay dans l’Essonne, ce lieu – dont l’ouverture est prévue en juin 2023 – a pour ambition d’offrir un espace de dialogue entre sciences, technologie et spiritualité.

Monsieur le Président de l’agglomération des communes,
Monsieur le Maire,
Monsieur le directeur général de l’Etabt public d’aménagement Paris Saclay,
Monseigneur, cher Michel,
Chers amis,

Je m’adresse ce matin à vous en tant que représentant du P. François Boëdec sj, supérieur provincial des jésuites d’Europe occidentale francophone, qui, malheureusement retenu à l’étranger au dernier moment, n’a pu nous rejoindre pour cette cérémonie. Il vous prie de l’en excuser. Je me fais son porte-parole pour vous communiquer ce qu’il voulait nous dire brièvement ce matin.

Tout d’abord sa joie de voir arriver cet évènement de la pose de la première pierre. Dans cette période où nous avons tous appris à reporter, déplacer, parfois annuler les projets, et à nous tenir à distance, il est heureux, grâce à tous les acteurs et responsables réunis ici, de voir ce projet sortir de terre.

Notre présence signifie combien le Centre Teilhard de Chardin est le fruit d’une collaboration. Ce n’est pas un projet solitaire, porté par une seule entité, c’est le fruit d’un travail collectif. Entre acteurs de l’Église catholique qui ont désiré ce projet, et bien sûr avec tous les acteurs et responsables publics, de la ville, du conseil départemental, de la région, de l’État, et bien d’autres encore…

Ce projet du Centre Teilhard de Chardin trouvant sa place dans ce grand projet de l’État voulant créer ici à Saclay un grand pôle universitaire et scientifique de rang mondial. Et nous disons notre grande joie que Jean-Marie Duthilleul, que nous connaissons depuis longtemps, et qui ne peut être malheureusement parmi nous aujourd’hui, nous ait accompagné comme architecte dans cette aventure.

La Compagnie de Jésus a répondu présent à la demande qui nous a été faite par le diocèse d’Evry. Et je voudrais une nouvelle fois remercier Mgr Michel Pansard pour sa confiance et son souhait de nous associer à ce projet stimulant pour la Compagnie de Jésus parce qu’il rejoint profondément nos intuitions apostoliques : ce qui touche à l’accompagnement des plus jeunes dans toutes les dimensions de leur existence (1), mais aussi la présence aux questions que posent à notre humanité les évolutions scientifiques et techniques (2).

L’accompagnement des jeunes tout d’abord (1)

discours pour la premiere pierre-Yannick BOSCHAT Les jésuites sont présents sur le plateau de Saclay, parfois depuis de nombreuses années, avec notamment les aumôneries de l’École Centrale-Supélec, de Polytechnique, d’HEC. Et beaucoup d’étudiants du plateau ont fait leur prépa au Lycée Sainte-Geneviève de Versailles.

Nous avons cette tradition, cette expérience, ce désir toujours vivant d’essayer d’accompagner et de former les jeunes dans toutes les dimensions de leur vie (humaine, intellectuelle, éthique et spirituelle).

Former des hommes et des femmes ouverts et enracinés dont notre société a tant besoin, des hommes et des femmes pour les autres, particulièrement des plus fragiles. En étant notamment présent aux dimensions qui sont au cœur des études : ici, au Centre Teilhard de Chardin, les enjeux éthiques, philosophiques, anthropologiques de l’activité scientifique. Nous sommes persuadés que le message de l’Évangile peut éclairer et orienter beaucoup de ces enjeux, et être, à côté d’autres, une source de renouvellement pour notre société souvent divisée et inquiète. Cela dans le cadre précieux de la laïcité de l’État « qui doit permettre à tous, croyants de toutes religions et non-croyants, de vivre ensemble » [1].

Et puis, en en ces temps où nous espérons, grâce aux efforts de chacun, voir peu à peu s’éloigner la crise sanitaire, l’ouverture d’un lieu comme le Centre Teilhard de Chardin est une bonne nouvelle pour beaucoup d’étudiants qui ont été privés ces derniers mois de ce qui fait la vie étudiante : les occasions de se réunir, de travailler et d’avancer ensemble ; et toutes ces rencontres informelles qui se révèlent essentielles dans un projet de vie : avec un enseignant ou avec des amis…

Le Centre Teilhard de Chardin est appelé à être un lieu de vie, de croisement, d’échanges, de célébrations. Un lieu de rencontres informelles et fructueuses entre des étudiants, des chercheurs, des enseignants. Un lieu qui éveille à des projets de vie, qui les aide à trouver du sens dans leurs études et plus largement dans leur vie, un lieu où naissent des initiatives nouvelles.

La Compagnie porte aussi depuis toujours un intérêt pour les questions scientifiques (2)

Sa fondation, en effet, a coïncidé avec les débuts de la science moderne, et depuis sa création, elle s’est engagée de façon très active dans la recherche scientifique. C’est ainsi que les sciences mathématiques et expérimentales furent introduites très tôt dans les programmes des collèges et des universités jésuites. Nous avons toujours cru que le fait de déchiffrer le monde était une manière de découvrir un peu mieux qui est Dieu et de servir ainsi les hommes.

Alors on le sait, le P. Pierre Teilhard de Chardin est l’un de ces jésuites scientifiques qui a le plus développé cette vision mystique d’un monde où la consistance même du réel lui parle de Dieu. Ce jésuite français, chercheur, géologue et paléontologue, théologien et philosophe, a su faire une synthèse inspirante et unifiante entre le nouveau récit de l’histoire du monde porté par les sciences au début du XXe siècle et la vision chrétienne.

Pour lui, ce que la science nous donne à comprendre du monde permet une forme de contemplation de ce que Dieu y fait. Nous souhaitons que le Centre Teilhard de Chardin reflète cette vision unifiante, en embrassant des problématiques scientifiques, sociétales et environnementales, au moment même où notre monde connaît de profonds bouleversements.

Le plateau de Saclay – nous le savons – est un lieu de développement de la connaissance scientifique. Cette connaissance accumulée rend possible de nouveaux développements techniques et ouvre de nouvelles frontières. Quel en sera l’impact sur notre environnement ? Quels seront nos capacités d’agir et de penser dans un univers de plus en plus technicien et complexe ?

Tous ces développements posent des questions éthiques et anthropologiques, et nous sommes persuadés que l’Église peut contribuer, doit contribuer, à ces réflexions en apportant sa pierre à l’édifice : nous n’avons pas d’ores et déjà les réponses à ces questions mais nous pensons qu’il y a dans la tradition chrétienne beaucoup de choses qui peuvent aider à les appréhender.

Pour toutes ces raisons, cela a du sens pour nous jésuites, d’être là aujourd’hui, partie prenante sous différentes modalités de ce projet du Centre Teilhard de Chardin.

L’aventure est bien lancée. Et nous sommes heureux d’y participer avec d’autres.

Merci à vous tous, chacun pour sa part et dans sa responsabilité, de permettre la réalisation de cette Maison Teilhard de Chardin, qui sera aussi dès lors un peu la vôtre.

Je vous remercie de votre attention.

François Boëdec

P. François Boëdec sj

Note

[1] Conseil permanent de la Conférence des évêques de France, Dans un monde qui change, retrouver le sens du politique, Bayard, Cerf, Mame, 2016, p. 63.

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