Faire de chaque centre spirituel une maison sûre
En janvier 2023, les cinq Centres spirituels jésuites de notre Province ont fait paraître un texte essentiel, intitulé « Repères pour la prévention de toute forme d’abus dans l’accompagnement spirituel ». Le P. Remi de Maindreville sj présente ce document qui participe à la lutte contre toute forme d’abus dans la Province EOF.
Ce « document cadre » est l’aboutissement d’un travail commun de tous les Centres spirituels jésuites, qui montre l’importance des enjeux.
Comme beaucoup d’acteurs de l’Église, les Centres spirituels jésuites sont concernés par la question de l’emprise et des abus, qu’ils soient de pouvoir, spirituels ou sexuels.
La prévention des abus est un engagement à mettre le projecteur sur la qualité d’une écoute bienveillante au sein d’une relation bientraitante qui ouvre à la vocation de chacun pour suivre le Christ, selon la Parole de Dieu et l’enseignement de l’Église.
Cela passe par des actions concrètes : disposition plus claire des lieux et des locaux, rappel du cadre d’un accompagnement spirituel, information rigoureuse des pratiques et comportements interdits, tout cela devant être formalisé par écrit et partagé.
De plus, faire de nos Centres des « maisons sûres » appelle à être particulièrement attentifs au recrutement, au suivi et à la formation des animateurs et accompagnateurs.
Des dispositifs de formation et de supervision
Cela suppose de mettre en place des dispositifs de formation et de supervision qui les aident à acquérir une conscience toujours plus claire de ce qui se joue entre deux personnes au sein d’une relation d’accompagnement.
Toute personne qui entre dans une démarche d’accompagnement spirituel ou pastoral voit sa sensibilité augmentée par l’expérience de la prière, de la relecture et du discernement, expérience dans laquelle elle s’engage. Elle confie des éléments intimes de sa vie et fait confiance.
C’est à l’accompagnateur de porter un soin particulier à cette relation dissymétrique pour rester et rechercher en permanence la bonne place et la bonne distance.
Pour cela, l’accompagnateur doit être supervisé afin de pouvoir nommer, devant un tiers, la manière dont il procède et les mouvements intérieurs qui le traversent lors des rencontres avec le retraitant qu’il accompagne.
Cette verbalisation implique une relecture où l’accompagnateur se pose quelques questions sur des points de méthode que lui fournissent les Exercices spirituels.
Accueillir la parole
À travers ce document élaboré par les Centres spirituels jésuites, il s’agit, aussi, de donner des repères pour accompagner des personnes ayant vécu des violences sexuelles ou toute autre forme d’abus, notamment en Église.
Il arrive en effet que l’accompagnateur reçoive des confidences de la part d’une personne accompagnée, celle-ci exprimant, parfois pour la première fois, avoir été victime ou témoin d’un abus ou d’une situation d’emprise. Comment l’aider à exprimer son expérience traumatisante ? Comment écouter, avec empathie et respect, sans jamais minimiser les faits évoqués ou la souffrance qui en découle ? Comment garder la juste distance ? Le document oriente les accompagnateurs, en rappelant à cette occasion l’importance de la parole dans un chemin de vérité, mais aussi les dispositions du droit pénal. Ce texte, qui formalise la démarche menée dans chaque Centre, s’adresse donc à tous les accompagnateurs et intervenants, jésuites comme laïcs, amenés à y intervenir. En signant ce document, chaque intervenant témoigne ainsi de son engagement à aider à faire de ce lieu une » maison sûre ».
P. Remi de Maindreville
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Supérieur de la communauté Alberto Hurtado à Saint-Denis Basilique
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L’accompagnement sans emprise
Christus, la revue de formation spirituelle ignatienne, a publié en janvier 2020 un numéro sur le thème « Pour un accompagnement sans emprise ». L’objectif est de traiter de la relation d’accompagnement spirituel afin d’être clair sur ce qui se joue consciemment ou inconsciemment dans la relation d’accompagnement tant du côté de l’accompagnateur que de la personne accompagnée. La revue donne la parole à des accompagnateurs, des formateurs d’accompagnateurs, un médecin, une psychologue mais aussi des biblistes. Il invalide l’idée que certaines fonctions rendraient d’emblée apte à accompagner. Capacité à écouter, formation et supervision demeurent indispensables.
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Se former à la supervision et à la prévention
Les Centres spirituels jésuites proposent des formations à l’écoute, au discernement, à l’accompagnement spirituel. Le Centre spirituel de Manrèse, à Clamart près de Paris, propose ainsi une formation à la supervision de trois jours pour des personnes qui auront à rendre un service de supervision auprès d’accompagnateurs et d’accompagnatrices de retraites spirituelles. Une session « Mieux écouter les personnes victime d’abus » s’adresse aux accompagnateurs dans le cadre de la mise en œuvre des recommandations de la Commission indépendante sur les abus sexuels dans l’Église (CIASE). Enfin, de nouvelles sessions sont proposées depuis deux ans aux personnes victimes d’abus qui ont le désir de restaurer ou d’approfondir leur relation avec Dieu.
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Cet article a paru dans la revue Échos jésuites (printemps 2023), la revue trimestrielle de la Province d’Europe Occidentale Francophone. L’abonnement, numérique et papier, est gratuit. Pour vous abonner, merci de consulter ce lien.
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Article publié le 1 mars 2023