« Faire Église ; vie religieuse et synodalité », par Sr Nathalie Becquart
Début octobre, le pape François lançait officiellement le « synode sur la synodalité ». Dans le monde entier, tous les catholiques – qu’ils soient fidèles laïcs, clercs ou personnes consacrées – sont invités à échanger sur la mission mais aussi sur la gouvernance de l’Église, pour mieux répondre aux défis de notre temps. C’est la première phase d’un parcours de réflexion, qui se terminera au Vatican, fin 2023. Nathalie Becquart, religieuse xavière, sera la première femme à avoir un droit de vote au synode des évêques. Elle explique en quoi la vie religieuse a un apport spécifique à offrir sur le thème de la synodalité.
Le pape François a fait de la synodalité, qui est « une marche ensemble » à l’écoute de l’Esprit, un axe central de son pontificat. Il appelle tous les baptisés à déployer la synodalité comme « le style missionnaire » de l’Église pour relever les défis du monde contemporain. Comme il le rappelait dans sa rencontre avec les évêques français à Rome : « La synodalité est la manière d’être Église aujourd’hui selon la volonté de Dieu dans une dynamique d’écoute et de discernement de l’Esprit Saint« . « La synodalité est la manière d’être de l’Église primitive (Ac 15) et elle doit être la nôtre. », écrivait-il dans le document final du synode sur l’Amazonie (§ 87).
Le synode, dont le thème exact est « Pour une Église synodale : communion-participation-mission », a été ouvert les 9 et 10 octobre à Rome par le pape François, et le week-end suivant dans tous les diocèses. Son objectif est clairement la conversion synodale de l’Église à travers un processus qui engage tout le Peuple de Dieu dans toutes les Églises locales.
La vie religieuse, une forme de synodalité
Les religieux et religieuses ont un rôle particulier et important à jouer pour promouvoir la synodalité et aider toute l’Église à vivre cette nécessaire conversion synodale, qui est l’appel de Dieu pour l’Église du 3e millénaire. En effet, la vie religieuse a une expérience très concrète de cette « marche ensemble » vécue comme un processus spirituel, que ce soit par sa longue expérience de vie communautaire, de discernement en commun ou encore par ses instances de délibération et de décision comme les chapitres et conseils. Religieuses et religieux se doivent de partager cela aujourd’hui à toute l’Église et contribuer ainsi à la formation au discernement personnel et communautaire nécessaire pour vivre la synodalité à tous les niveaux.
Par ailleurs, comme nous l’avons particulièrement souligné dans le Document préparatoire et le Vademecum, la synodalité, qui implique que tous soient écoutés et acteurs, invite à porter une attention particulière aux plus pauvres, aux plus petits, à celles et ceux qui sont aux périphéries. Elle doit favoriser la participation de tous et notamment donner voix aux sans voix. Les pistes proposées pour la consultation synodale invitent par exemple à s’interroger : « Quelle place occupe la voix des minorités, des marginaux, des exclus ? » La vie religieuse, comme nous le savons, porte dans son ADN la présence auprès des plus pauvres. Il est heureux de voir qu’aujourd’hui se développent des projets entre congrégations mais aussi des projets en Famille ignatienne associant jésuites, religieuses et laïcs, pour rejoindre et accompagner de manière créative et prophétique les personnes en difficulté.
La Famille ignatienne, un visage d’Église synodale
Au rassemblement de la Famille ignatienne de la Toussaint, à Marseille, comme au synode des jeunes, en 2018, j’ai vécu quelque chose de l’Église dont je rêve, un visage d’Église synodale qui donne à vivre et voir la collaboration et la fraternité entre hommes et femmes, entre personnes de différentes générations, entre chrétiens de toutes vocations… Ces moments forts sont une expérience de l’Esprit qui est à l’œuvre dans le monde et dans l’Église : ils témoignent de la joie reçue quand nous mettons en œuvre véritablement ces trois mots-clés du synode 2021-2023 : communion – participation – mission.
Puissions-nous, en famille ignatienne et dans tous nos lieux d’Église, chercher avec d’autres comment « marcher ensemble » et discerner à quoi l’Esprit nous appelle comme l’exprime la question fondamentale posée pour ce synode : « Comment se réalise aujourd’hui, à différents niveaux (du niveau local au niveau universel) ce ‘marcher ensemble’ qui permet à l’Église d’annoncer l’Évangile, conformément à la mission qui lui a été confiée ; et quels pas de plus l’Esprit nous invite-t-il à poser pour grandir comme Église synodale ? (Document préparatoire, 2) ».
Témoignage du Cardinal Jean-Claude Hollerich, rapporteur général du synode de 2023
« Il faudrait une nouvelle Pentecôte pour l’Église. Nos prédications, notre théologie ne touchent plus le coeur des hommes. Que faire ? Comment réagir ? Dieu ne nous abandonne pas. Le Peuple de Dieu est constitué de tous les baptisés, qui ont reçu l’Esprit Saint. Synodalité, rencontre, écoute, discernement : voilà les mots-clés qui permettront au Peuple de Dieu de poursuivre sa mission de service au monde. Par la phase d’écoute, nous pourrons entrevoir les routes que le Seigneur nous propose. Cela présuppose que nous devons devenir des femmes et des hommes de prière pour que l’écoute des uns et des autres devienne écoute de Dieu. »
Sr Nathalie Becquart
Xavière, Sous-secrétaire du secrétariat général du Synode des évêques
Pour aller plus loin
> Site officiel du Synode : https://www.synod.va
Cet article a paru dans la revue Échos jésuites (hiver 2021), la revue trimestrielle de la Province d’Europe Occidentale Francophone. L’abonnement, numérique et papier, est gratuit. Pour vous abonner, merci d’envoyer votre mail et/ou votre adresse postale à communicationbxl [at] jesuites.com.