En ce mercredi des cendres, la bibliste et philosophe Françoise Mies nous partage une méditation sur le sens du Carême : « Un temps pour reconnaître l’appel qui nous est lancé à revenir vers Dieu. » Et même si « en cette pandémie, nous peinons à imaginer que ce temps puisse être favorable à quoi que ce soit », elle nous rappelle les mots de st Paul : « voici maintenant le moment favorable, voici maintenant le jour du salut ! » (2 Co 6,2)

arcabas Peu de jours après, le plus jeune rassembla tout ce qu’il avait, et partit pour un pays lointain où il dilapida sa fortune en menant une vie de désordre. Il avait tout dépensé, quand une grande famine survint dans ce pays, et il commença à se trouver dans le besoin. (…) Alors il rentra en lui-même et se dit : “Combien d’ouvriers de mon père ont du pain en abondance, et moi, ici, je meurs de faim ! Je me lèverai, j’irai vers mon père, et je lui dirai : Père, j’ai péché contre le ciel et envers toi. Je ne suis plus digne d’être appelé ton fils. Traite-moi comme l’un de tes ouvriers.” (Luc 15, 13-19)

Apprendre à discerner Sa présence

Une des premières paroles que Dieu adresse à Adam fut : « Où es-tu ? » (Gn 3,9). La parole qui monte parfois à nos lèvres est : « Où est-Il ? ». Discerner Sa présence. L’expression suppose que Dieu, innommé pourtant, est là. Présent. Voilà la réalité, énorme quand on y pense, celle de notre foi. Mais l’expression laisse entendre aussi que Dieu n’est pas présent comme vous et moi. Non qu’Il soit en distanciel – grâce à Dieu ! –, Il est présent autrement. Une présence qui se donne à chercher, à interroger, à discerner, un peu comme on apprend à voir dans le noir ou dans l’éblouissement d’une trop grande clarté. Au fil de ce Carême et des lectures bibliques proposées, avec à l’horizon le mystère pascal, apprenons à discerner Sa présence.

Entendre l’appel à revenir vers Dieu

Ouvrant le Carême, voici le mercredi des cendres. En cette pandémie, nous peinons à imaginer que ce temps puisse être favorable à quoi que ce soit. Nous pourrions en venir à douter de Sa présence. Pourtant, st Paul dit : « voici maintenant le moment favorable, voici maintenant le jour du salut ! » (2 Co 6,2). Apprenons à reconnaître ce jour et ce temps comme un temps donné par Dieu, un temps de grâce. Un temps pour reconnaître l’appel qui nous est lancé à revenir vers Dieu. Avant d’être une conversion morale, le Carême est un temps de retour vers Dieu : « Revenez à moi de tout votre cœur ! » (Jl 2,12). Est-ce Lui qui s’est éloigné de nous ou nous qui nous sommes éloignés de Lui ? Quand l’Église, à la suite de Jésus, appelle à l’aumône, à la prière, au jeûne, à des pratiques qui nous ancrent la relation à l’autre et à Dieu dans l’esprit et le corps, elle nous propose des voies de retour et de conversion. Un des accents de Jésus est aussi d’apprendre à voir le Père présent dans le secret de nos aumônes, de nos prières, de nos jeûnes : présent dans le regard de l’autre en attente, en notre âme priante, dans nos faims les plus essentielles (Mt 6,1-6.16-18). Revenons à Lui, convertissons-nous !

Ce mercredi, nous recevons les cendres, signe biblique de finitude et de pénitence. Ces cendres sont celles des rameaux ouvrant la Semaine Sainte de l’année passée. Elles sont donc aussi un signe du mystère pascal : apprenons à les voir et à les recevoir comme une première annonce de la mort et de la Résurrection du Christ.

Françoise Mies, bibliste et philosophe à l’Unamur

Françoise Mies

 

 

 

Illustration: Le fils prodigue, Arcabas, église Saint-Hugues de Chartreuse.

Découvrir d’autres articles sur le Carême