Le Carême, un temps pour changer, par le P. Christian Motsch sj
Une girafe, en gros plan ? Quelle drôle d’idée pour illustrer le Carême… Le P. Christian Motsch sj nous invite à entrer en Carême avec originalité.
Une girafe nous a déjà surpris en apparaissant à la Crèche au moment de l’Epiphanie. Une grande peluche aux membres articulés qui lui ont permis de venir se prosterner avec les mages, une mascotte apaisante qui accompagnera les enfants du caté, comme témoin de leur cheminement en ces temps où ils ne peuvent se retrouver régulièrement, sinon en petits groupes, et masqués dès 6 ans.
Elle figure aussi dans Legacy, le dernier film de Yann Arthus-Bertrand, symbole fugace de cette trop longue liste rouge des espèces animales et végétales qui disparaissent de la surface de la terre chaque jour sans cri audible à nos oreilles rendues comme sourdes.
De nombreux établissement scolaires ou mouvements de jeunesse à travers le monde la présentent comme le but d’une éducation jésuite : devenir une girafe. La raison ? La girafe a un cœur énorme afin de pomper le sang tout le long de son cou et, du haut de ce long cou, elle voit loin. Un grand cœur et une perspective large et clairvoyante du monde. Voilà très sûrement ce dont nous aurons besoin pour nous relever après la pandémie de Covid-19, et construire “un monde meilleur”.
Cette pandémie dont nous souffrons peut être vue comme le prélude d’une énorme crise écologique et de toutes les tensions qui l’accompagneront en une série de malheurs collectifs, mettant l’humanité face à des défis immenses.
Dans un récent ouvrage d’entretien le pape François souligne que le « génie de l’histoire humaine c’est qu’il y a toujours un moyen d’échapper à la destruction ». On ne peut pas « être en bonne santé dans un monde malade ». Sous des formes multiples « le virus de l’indifférence » détruit notre humanité. Cette ind
ifférence qui se transforme en une violence silencieuse et bien élevée. Dans la contrainte du confinement comme dans la diffusion de la transmission virale, chacun a pu mesurer l’importance de ce qui nous reliait aux autres.
Le Pape dénonce les impasses et les abus, mais il reste toujours à l’affût d’un chemin vers un avenir meilleur, encourageant un nouveau type d’économie et de politique. Il invite au discernement et à l’action. Dans sa troisième encyclique, Fratelli tutti, le pape François oriente justement notre attention sur la fraternité qu’il définit comme « un amour universel » qui
dépasse les tribus et les distances géographiques. Cet appel à la fraternité résonne fort en période de pandémie où les mesures de protection obligent à la distance physique, même avec nos proches, et à surveiller nos frontières…
Nous avons repris le titre de ce livre comme un leit-motiv pour ce Carême : « Un temps pour changer ». Osons rêver. Dieu nous demande d’oser créer quelque chose de nouveau. Nous ne pouvons pas revenir aux fausses sécurités de l’organisation politique et économique d’avant la crise. »
Que nos cœurs en ce Carême s’ouvrent réellement pour entendre la Clameur de la terre et celle des pauvres.
Laisse-toi entraîner, secouer, défier… Ouvre-toi !
P. Christian Motsch sj,
Communauté du Christ-Roi au Luxembourg,
février 2021
Article publié le 15 février 2021