Dans la tradition, le combat spirituel est un passage obligé dans l’aventure de la vie du baptisé. En effet, l’appel à suivre le Christ en vérité et liberté conduit nécessairement au discernement des esprits et au combat spirituel.

En écoutant au plus proche de l’humain, il nous est donné de mieux percevoir que le désir de vivre, le désir d’être aimé et le désir de créer sont au coeur du combat humain et spirituel. En scrutant deux grandes figures de la Bible, celle de Jacob et de Moïse, mais plus encore en contemplant la Parole de Dieu qui est venue planter sa tente parmi nous, nous pouvons découvrir que ce combat vient nous rejoindre à la fois dans notre humanité mais aussi dans la filiation divine inscrite en nous et révélé en Christ. Pour nous enfin qui poursuivons notre marche et notre combat, des témoins qui ont fait la traversée nous interrogent et sont également des intercesseurs : Antoine de son désert intérieur, Ignace en pleine Renaissance, Silouane de la sainte montagne et Madeleine Delbrêl de la ville d’Ivry. Ces figures se détachent dans des contextes et des situations historiques précises. Il peut nous être donné, avec eux, de relire notre propre histoire, en nous émerveillant de ce que d’autres, comme des frères aînés, ont pu dire ou écrire de leur expérience.

Biographie de l’auteur

Léo Scherer, jésuite, a exercé depuis longtemps le ministère d’accompagnement spirituel. Il a formé des générations d’accompagnateurs spirituels, laïcs ou clercs. Il a pu ainsi creuser l’originalité de la tradition de St Ignace et son rapport aux autres traditions spirituelles et en faire profiter ses auditeurs dans les centres spirituels ignatiens du Châtelard à Lyon, de la Baume à Aix en Provence, ou de St Hugues de Biviers à Grenoble et plus largement dans différents pays francophones .

Le commentaire de Michel Fédou sj- Théologien, Centre Sèvres Paris. :

Une illusion guette parfois les chrétiens: croire que leur vie de baptisés les protège du « combat spirituel ». La nouvelle publication de Léo Scherer rappelle qu’un tel combat est en réalité inévitable : il l’est humainement, car l’être humain doit consentir à certains renoncements pour trouver le chemin d’une juste relation à autrui ; il l’est spirituellement, car c’est à travers lui que nous apprenons, « de morts partielles en résurrections ébauchées » (p. 63), à nous laisser conduire par l’Esprit jusqu’à l’ultime « lâcher prise » qu’est « la remise de notre souffle dans les mains d’un Autre » (ibid.).

Le parcours est nourri de la Parole de Dieu. L’auteur évoque d’abord les combats de Jacob et de Moïse, puis s’arrête sur le Christ lui même et sur l’épreuve des tentations au désert. Par là se dévoile l’enjeu radical du combat spirituel, qui se joue au croisement de la condition humaine et de la la filiation divine. Ce combat se poursuit « dans l’histoire et dans les coeurs » (p. 35), comme l’attestent des témoignages aussi divers que ceux d’Antoine, d’Ignace de Loyola, de Silouane ou de Madeleine Delbrêl.

D’autres témoignages anciens ou contemporains sont également invoqués tout au long du parcours, montrant comment des hommes et des femmes ont su vivre dans l’Esprit les combats de leur existence. Ils encouragent ainsi le lecteur à entendre pour lui même l’invitation que Léo Scherer a inscrite au seuil de son beau texte : « Choisis la vie…

Avant-propos

Nous assistons aujourd’hui à trois révolutions qui interagissent : la mondialisation économique, celle de l’informatique et celle de la génétique. Ces changements en cours annoncent des défis qui concernent de nouveaux rapports à soi et au corps, au temps, à la mort et à la vie.

L’humanité de l’homme est-elle menacée ? Je préfère parler d’une humanité fragile, mais toujours assez avertie sur elle-même pour se frayer sa voie dans l’existence. Certes l’écart entre les pays riches et les pauvres ne cesse de grandir, la violence est à nos portes et dans notre cœur. Il y a les familles recomposées, la transmission des valeurs et de la foi fait difficulté, le suicide des jeunes nous inquiète. Mais en même temps surgissent des gestes de solidarité, des engagements durables, une soif de fraternité et de justice. Enfin il y a des réconciliations qui ne font pas de bruit et qui sauvent le monde. L’exemple de Maïti Girtanner est significatif.

Comment dans ce contexte parler de « combat spirituel » ?

Une double disqualification surgit aussitôt. Parlez-nous plutôt de combat tout court, le combat pour survivre, le combat pour se battre contre toutes les plaies qui tombent sur notre humanité en mal d’enfantement… et cela suffira. Ou encore : parlez-nous d’engagement et de vie chrétienne. La foi ne saurait déserter les lieux de combat de l’homme, ce qu’Emmanuel Mounier dans un autre siècle avait rappelé avec pertinence. Enfin, que peut nous apporter ce vieux mot de la tradition, intitulé « combat spirituel », et qui semble réservé aux moines ? « Vos réponses ne nous intéressent pas, les questions ont changé. » Chaque époque et dans le contexte qui est le sien doit inventer des champs d’investigations, qui aujourd’hui sont multiples.

De quoi s’agit-il ?

Il faut croire pour vivre. Chacun doit désormais aller chercher au plus profond de soi la ressource de poser des actes en responsabilité. De ce point de vue nous sommes tous mis à l’épreuve.

Mais entre l’injonction de la Genèse : « Le péché est tapi à ta porte, il te désire. Mais toi, domine-le » et ce que Paul nous dit dans l’Epître à Timothée : « Mon fils, continue le combat de la foi », il y a un abîme. Ce dernier combat naît de la foi, en lien avec le Christ de Pâques. Il se produit dans la confiance en la victoire qui a déjà été remportée par le Christ. Entre la Genèse et Paul, il y a le surgissement de l’inouï de Dieu : Dieu en son Fils est venu restaurer l’image de l’homme défigurée par le péché pour que ce dernier parvienne à sa ressemblance. Le Fils s’est revêtu de notre humanité pour que nous soyons porteurs de l’Esprit.

Nous dépouiller du vieil homme pour nous laisser revêtir de l’homme nouveau est un combat, le combat de toute une vie. Il pourra prendre des formes plus précises à certaines étapes de la croissance de la vie humaine et de la vie dans l’Esprit, ou selon des événements, des solidarités à tenir ou encore des décisions à prendre.

Avec ces précisions et dans cet esprit, je voudrais aborder ce sujet « Choisis donc la vie…, un combat spirituel » à travers quatre approches et donner ainsi quelques points de repères.

J’aimerais parler du combat spirituel à travers les chemins d’humanisation qui font partie de notre devenir d’homme. Puis à l’aide de figures bibliques, nous pourrons mieux saisir ce qui est en jeu pour les gens de l’Alliance. Enfin en contemplant cet homme qui vient de Dieu nous verrons le véritable enjeu du combat spirituel dans la vie de l’Esprit à la suite du Christ : il s’inscrit dans la double filiation, humaine et divine. Ce qui nous permettra de revisiter quelques visages de la tradition, puisque ce combat se poursuit dans l’histoire et le cœur des croyants.

Après la conclusion, quelques documents seront proposés qui concernent l’aujourd’hui de nos vies : la « tempête apaisée », la communication dans le couple, le travail de deuil dans nos vies, les décisions éthiques pour rejoindre les défis et les solidarités qui nous attendent dans la société et le monde.

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