« Le Pacte mondial sur les migrations nous permet de prendre ensemble un peu de hauteur », par le Père Antoine Paumard, directeur du JRS France
Le Pacte mondial sur les migrations des Nations unies a été approuvé le 10 décembre 2018 à Marrakech, devant quelque 150 pays réunis en conférence intergouvernementale. Le Père Antoine Paumard sj, directeur du Service jésuite des réfugiés (JRS France), donne quelques éclairages.
En 2016, sous l’impulsion des pays européens, l’ONU se lance dans le projet de rédaction d’un pacte mondial sur les migrations. Un constat est sous-jacent à l’élaboration de ce travail : la question migratoire ne peut que se régler ensemble. Commencent alors des séries de discussions entre tous les pays, dont les travaux sont publics et les comptes-rendus des commissions consultables sur le net. Les 191 pays réunis, que ce soit des pays de provenance, de transit ou d’accueil, débattent sur la question migratoire qui les affectent différemment. Le Saint-Siège participe à ces débats et publie, en 2017, 60 points d’actions en soutien aux démarches onusiennes. Accueillir, protéger, promouvoir et intégrer sont les verbes choisis par le Pape François dans le message pour la journée mondiale du migrant et du réfugié de 2018.
Alors que les pays du monde entier vivent avec la conviction qu’il n’est pas possible de résoudre seule le défi des migrations qui constitue « une préoccupation commune pour l’humanité », les travaux aboutissent à un texte, un pacte mondial pour « des migrations sûres, ordonnées et régulières », écrit en deux parties, l’une portant sur les migrations, l’autre sur les réfugiés.
Ce texte achevé en juillet 2018, accepté en Assemblée Générale des Nations Unies le 10 décembre à Marrakech, rappelle son « caractère non contraignant » (§15.b) et « réaffirme le droit souverain des Etats » (§15.c). Il énonce 23 objectifs qui sont déclinés par la suite dans le pacte en déclarations, en moyens à mettre en œuvre, en idées à explorer. Ces objectifs recouvrent une meilleure collecte de données concernant les migrations (n°1, 3) pour fonder les politiques à élaborer ; une sécurisation de la situation de la personne migrante et au respect de sa vie par les Etats (n° 4, 5, 6, 8, 11, 12, 13, 14, 20, 22) ; une lutte contre les filières de trafic (n°9, 10) ; une protection des pays d’origine pour combattre les causes des départs (n°2) comme des pays d’accueil pour promouvoir l’intégration (n°15,16, 17,18,19). Nous retrouvons ici la volonté politique énoncée par les gouvernements français depuis déjà quelques années : maîtrise des flux migratoires, lutte contre les passeurs, protection de ceux qui en ont le plus besoin. Mais ce Pacte, basé sur la solidarité, la coopération et le dialogue entre les pays, nous rappelle que nous ne mettrons pas en place par nous-mêmes ce qui est nécessaire pour rendre plus sûres les routes migratoires et plus efficace la protection des personnes comme des Etats.
Il reste un long chemin à l’Europe pour mettre en place un système unifié de demandes d’asile et trouver une manière de sortir des « accords de Dublin », égoïsme fait au mépris des personnes. Le Pacte mondial sur les migrations nous permet de prendre ensemble un peu de hauteur, de revenir aux textes fondamentaux – Charte des Nations-Unies, Déclaration universelle des Droits de l’homme etc. – pour penser une question brûlante, dont personne ne peut se passer.
Père Antoine Paumard sj,
Directeur du Service jésuite des Réfugiés (JRS-France)
Pour approfondir
> Lire le Pacte mondial pour des migrations sûres, ordonnées et régulières sur le site de l’ONU (version française)