Louis Dattin Le 13 novembre 1945, Louis Dattin, qui avait connu les jésuites durant sa scolarité dans le collège-lycée jésuite du Mans, entre au noviciat à Laval. C’est le début d’une formation longue, humaniste d’abord pour deux ans, avec un retour au latin, au grec, qui lui assure une maîtrise parfaite de la langue française. Louis en a gardé un style ciselé, précis, concis, qu’on retrouve dans ses homélies et dans tous ses écrits. Puis il effectue une plongée dans la philosophie durant trois ans. Après sa régence au Mans comme responsable de niveau, Louis entame quatre ans de théologie à Fourvière qui le conduisent à être ordonné prêtre en 1957 à 32 ans.

Suivent alors les deux grandes périodes de sa vie de prêtre. 23 ans comme éducateur spirituel dans des établissements jésuites d’enseignement au Mans puis à Vannes et 39 ans à la Réunion, deux périodes entrecoupées par une expérience pastorale en paroisse rurale à Chalus, en Haute-Vienne, de 1982 à 1984 : elles éveillent en Louis le goût d’accompagner au jour le jour les personnes dans leur désir d’une vie chrétienne éclairant tous les domaines de l’existence.

À 59 ans, à l’âge où certains envisagent leur départ en retraite, Louis débarque donc à la Réunion. Le voici chargé de l’animation de la paroisse de l’Assomption, à quelques pas de la Résidence : 7 années où Louis déploie tous ses dons de pasteur. Il a du goût pour cela, il y est heureux. Si bien que lorsqu’en 1991 le Provincial lui confie la charge de la chapelle jésuite du Sacré-Cœur, c’est un renoncement qu’il accepte de vivre.

À travers désolation et consolation, Louis assume ce changement. Et la paix retrouvée va porter ses fruits. Chapelain, il est appelé par Mgr Aubry à structurer le service diocésain du catéchuménat autour d’une équipe forte et soudée. Pendant dix ans, Louis participe ainsi à l’accompagnement et à la formation d’adultes désireux d’une vie chrétienne fondée sur les sacrements. Ce ministère lui procure une grande joie intérieure. L’intimité et la proximité que favorise la démarche du catéchuménat disposent l’accompagnateur à faire l’expérience que le vrai pilote, c’est Dieu lui-même.

Dans le même temps, Louis est chargé par l’évêque de participer à l’officialité du diocèse en tant que juge auditeur. Il y exerce ses dons pour accompagner ceux qui sollicitent la justice de l’Eglise afin de résoudre des situations canoniques difficiles, souvent liées à des séparations entre époux. Louis sait faire preuve de délicatesse pour que les personnes ne se sentent pas humiliées mais bien respectées.

En 1997, Louis inaugure le dernier cycle de sa vie apostolique en rendant des services à la paroisse Notre-Dame-de-la-Délivrance, à Saint-Denis. Il continue aussi à participer aux activités de la chapelle de la résidence. Désormais, son apostolat se concentre sur l’accueil et l’écoute. Le rythme est plus lent, les oreilles sont appareillées, cependant la passivité rend Louis encore plus disponible aux autres. Beaucoup l’éprouvent : il est là pour eux ; chacun se sent accueilli avec le fardeau qu’il porte ; le P. Louis Dattin restaure en chacun la confiance.

La silhouette vieillie, le pas incertain, l’entrée de Louis à l’EHPAD Saint-François d’Assise, le 21 juin dernier, n’interrompt pas ce rôle de témoin qui encourage. De nombreux visiteurs lui expriment leur reconnaissance d’avoir été là dans leur vie, présent au bon moment pour les inciter à demeurer résolument tournés vers l’avenir.

Ces paroles, Louis se les appliquait à lui-même, dans ses propres combats à soutenir, en particulier une grande anxiété. Et justement, parce que lui-même acceptait d’être remis en route par Dieu, il pouvait aider d’autres personnes à s’en remettre davantage à la grâce de Dieu qui ne se dément jamais.

P. Stéphane Nicaise sj et Host du Roure sj,
communauté Saint-Denis à La Réunion