P. Yves Morel (22.12.2022)
Aîné d’une fratrie de cinq garçons, Yves Morel est né en 1930 à Aurillac, dans le Cantal. Après des études de lettres et d’histoire à Montpellier, diplômé de Sciences Po Paris, et 27 mois de service militaire comme chasseur alpin, il entre au noviciat en 1957. Il dit son désir de partir en mission, dans d’autres pays que les anciennes colonies françaises, indépendantes à partir de 1960. Mais la Province de Paris a perdu la Chine et n’est plus présente qu’au Maroc, au Cameroun et en Côte d’Ivoire. Yves part donc en régence enseigner le français et l’histoire-géographie à Témara, au Maroc.
Ordonné prêtre à Lyon en 1965, Yves est envoyé à I’INADES (Institut africain pour le développement économique et social) d’Abidjan. Proposant une formation à distance pour des cadres moyens, Yves anime aussi des sessions dans différents pays et exerce d’autres ministères pastoraux en ville ou en brousse.
Après son Troisième An, Yves rejoint en 1969 le Collège Libermann de Douala, au Cameroun. Professeur d’économie, d’histoire-géographie et d’instruction religieuse au lycée, il rédige des manuels pour ses élèves et visite les pays sur lesquels il enseigne : URSS, USA, Afrique du Sud…. Aumônier des anglophones de Douala, il parcourt aussi le pays, rencontrant Baba Simon, le premier missionnaire camerounais parti au nord, et profite de la présence d’Eric de Rosny, proche de la religion et de la culture d’origine des côtiers du Cameroun.
Rappelé à I’INADES d’Abidjan en 1983, Yves s’occupe de la bibliothèque ouverte aux étudiants, dont le campus est proche. A sa retraite, son Provincial lui demande de monter la bibliothèque du futur ITCJ (Institut de théologie de la Compagnie de Jésus). Il acquiert alors patiemment des livres, surtout dans les maisons de la Compagnie fermant en France, qui intègrent la bibliothèque de l’institut enfin construit en 2003. Des handicaps de motricité, apparus depuis quelques années, s’accroissent, limitant son action à l’extérieur et laissant présager un retour en France. Dans l’homélie de la fête de son jubilé, en 2007, il reprendra à son compte les paroles d’un missionnaire : « En venant en Afrique, je croyais pouvoir convertir les gens. Ce sont eux qui m’ont converti. »
Yves revient en France en 2010, d’abord à La Chauderaie à Francheville, puis en 2012, à la Maison Soins et Repos à Vanves. D’une énergie et d’une ténacité de fer, il brave les handicaps en faisant force séances de kiné et en actionnant lui-même les roues de son fauteuil jusqu’au bout. Sa vivacité culturelle et intellectuelle lui permet aussi de poursuivre certaines activités : accompagnement d’une équipe CVX, proposition de sorties culturelles, traductions pour Rome, corrections de travaux de jésuites en formation, relecture des épreuves d’Etudes. Jusque très récemment, il proposait un film chaque semaine et rédigeait le bulletin communautaire, souvent illustré avec sensibilité de ses dessins et portraits bien croqués.
En 2018, Yves concluait ainsi le récit de ses voyages, intitulé « Quatre-vingts ans de pérégrination » : « Mon parcours est un pèlerinage qui m’a conduit aux sources de la vie. Tout ce que j’ai vu, sans l’avoir toujours choisi, me mène de plus en plus au Créateur de toutes choses. On ne peut qu’admirer sa puissance, son intelligence et le souci qu’il prend des pauvres êtres fragiles que nous sommes. Loué sois-tu Seigneur, toi qui nous envoies ton Fils Jésus pour que nous nous sentions proches de toi et devenions tes enfants adoptifs. »
P. Jacques Gebel sj, communauté jésuite Pedro Arrupe à Vanves
Article publié le 27 octobre 2022