« Pâques à Beyrouth » – éclairage du P. François Boëdec, Provincial
Depuis Beyrouth, le P. François Boëdec, Provincial, adresse un éclairage sur la Pâques que nous vivons. « Être des hommes et des femmes de tenace espérance, n’est-ce pas ce à quoi le Ressuscité nous invite ? »
C’est de Beyrouth que j’écris ces mots de Pâques. En marchant dans la ville encore défigurée par l’explosion d’août 2020, je repense au poème de Blaise Cendrars « Les Pâques à New York » rédigé en avril 1912, au sortir d’une nuit d’errance dans New-York et ses bas-fonds. Croisant les visages de l’humanité souffrante et aimante, cet homme qui n’était pas un pilier d’Église, se souvient de l’agonie du Christ au milieu du monde. Et il lui parle, doutant que ce Seigneur puisse faire quelque chose pour sortir le monde de son « désespoir farouche ».
Nous aussi, nous marchons, traversant les endroits sombres et peu fréquentables de nos vies, partageant les malheurs et les peurs du monde. Les jours saints ont eu le goût de nos lassitudes et de nos petitesses, de nos résignations et de nos tristesses, mais aussi de nos espérances et de nos combats. Il y a des croix et des passions qui paraissent ne jamais prendre fin, et des résurrections qui semblent tellement tarder à se réaliser.
Passer du désespoir à l’espérance, de la crainte à la confiance, c’est le chemin de la foi. Celui que les femmes ont parcouru au matin de Pâques. La nouvelle de la Résurrection arrive comme par effraction dans l’histoire de l’humanité. Elle déplace et remue ce qui semblait arrêté pour toujours.
Sommes-nous des hommes et des femmes de la nouveauté pascale ? Ne sommes-nous pas tentés de retourner à nos tombeaux ? Hésitants à abandonner ce qui est déjà mort et que nous connaissons par cœur, pour la nouveauté d’une vie réouverte ? Il y a au cœur de la foi chrétienne l’annonce d’un renouvellement radical, même quand l’actualité du monde donne les signes apparents de la victoire du mal.
Être des hommes et des femmes de tenace espérance, n’est-ce pas ce à quoi le Ressuscité nous invite ? Aider nos contemporains à imaginer, personnellement, en Église et en société, les chemins nouveaux à emprunter.
Que cette fête de Pâques fasse grandir notre confiance en la puissance d’un amour qui n’a pas fini de relever le monde.
P. François Boëdec, Provincial d’EOF