Portrait : P. Nicolas Steeves sj
Nicolas Steeves sj a prononcé ses derniers vœux le 8 septembre dernier, en l’église Saint-André du Quirinal (Sant’Andrea al Quirinale), à Rome. Il retrace ici son parcours et les sources de sa vocation.
« Et tu viens d’où, au fait ? » Cette question banale que les gens me posent, quand on se rencontre, ne trouve pas de réponse simple. Sauf à me comparer à un petit arbre. J’ai des racines familiales des deux côtés de l’Atlantique (papa de Nouvelle-Angleterre, maman bourguignonne). Mes branches apostoliques croissent des deux côtés des Alpes : ma formation jésuite s’est surtout faite en France et j’y ai travaillé comme régent (deux ans à l’aumônerie de Ginette et d’HEC) et pendant mon doctorat (église Saint-Ignace, Paris). Le tronc se nourrit de la spiritualité ignatienne, de la dévotion au Sacré-Cœur, de l’amour pour l’Eucharistie. Le Fils de l’Homme n’a pas de lieu où poser la tête ? Moi non plus, si ce n’est sur son Cœur à Lui. J’ai hérité de ma famille une très (trop ?) forte tendance à me dépenser dans le travail. Mais je trouve aussi dans la musique (piano, orgue, chant choral) une source de respiration et d’inspiration.
Pré-adolescent, l’idée de devenir prêtre me vient, mais je ne m’identifie pas à la figure du curé de paroisse. Prêtre en route, mais enraciné dans une vie communautaire et de fortes amitiés ; prêtre à la spiritualité d’autant plus nourrissante qu’elle serait flexible, faisant droit aux exigences du cœur, du corps et et du cerveau… Où diable trouver tout cela ? Plus facile de rêver d’une vie « normale » : mariage, enfants, carrière… Je fus avocat d’affaires quelques années. Mais à Prague puis à Paris, le Seigneur ne me laissait pas en paix dans la carrière du barreau… Il me voulait pour sa mission. Je m’en ouvris à un jésuite, à un autre… Accompagnement sous forme de lutte (je ne me laisse pas facilement faire ni par Dieu, ni par les hommes), puis abandon (très !) progressif des résistances. J’entre au noviciat à Lyon en septembre 2000. Centre Sèvres (Paris), Heythrop College (Londres), l’Université pontificale grégorienne (Rome) puis de nouveau le Centre Sèvres… L’ordination presbytérale n’est pas facile à vivre, même si (ou parce que ?) j’ai une très grande estime pour le sacerdoce. Début d’enseignement de la théologie fondamentale à Rome, Troisième An à Portland pour redonner place aux racines américaines… Je sens enfin que c’est vraiment bien dans la Compagnie que le Seigneur m’appelle à vivre ma liberté. Je reviens à Rome où je deviens aussi Modérateur du Premier cycle de théologie à la Grégorienne et préfet des études des jésuites en formation au Gesù.
Malgré mes inconstances, c’est bien Notre forme de vie comme jésuites, « selon les lettres apostoliques et les Constitutions », qui me permet de vivre ce qui me tient le plus à cœur : l’amour et la liberté. Je le vis bien pauvrement au quotidien, mais un chemin est ouvert. L’arbre espère encore donner quelques fruits dans sa maturité, selon le plan de Dieu et les saisons qu’Il crée. Il est bon d’être une simple créature : c’est même une très Bonne Nouvelle !
Nicolas Steeves sj
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Article publié le 10 septembre 2019