« En Syrie, des communautés entières se rassemblent pour aider » – témoignage du P. Michael Zammit Mangion sj
Suite au tremblement de terre, le Provincial du Proche-Orient, le P. Michael Zammit Mangion sj, s’est rendu en Syrie, et témoigne de la peur et de la précarité des habitants. Il y présente également les actions du Service jésuite des réfugiés (JRS) et se réjouit de l’entraide entre les habitants.
Soutenir les victimes en faisant un don
Dans son témoignage ci-dessous, le Provincial du Proche-Orient, le P. Michael Zammit Mangion sj présente l’action du Service jésuite des réfugiés (JRS) en Syrie. Pour soutenir l’action du JRS en Syrie, vous pouvez faire un don via le site de l’OMCFAA, la Fondation jésuite pour la solidarité internationale.
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« Je suis arrivé à Alep avec le P. Mourad Abou Seif sj, le P. Tony Homsy sj et le P. Nawras Sammour sj le samedi 11 février. Le P. Tony O’Riordan, un jésuite irlandais qui est le directeur local du Service jésuite des réfugiés (JRS), nous avait précédés de plusieurs jours et dirigeait la réponse du JRS.
En arrivant à notre résidence à Aziziye, nous sommes passés près des ruines du bâtiment de l’ACCAD qui s’est effondré, tuant trois personnes, dont un prêtre. L’archevêque catholique grec émérite, Mgr Jeanbart, se trouvait dans le bâtiment lorsqu’il s’est effondré. Il a été sauvé par les sauveteurs. À droite, une photo de cette maison.
Le traumatisme des habitants d’Alep
Je m’attendais à voir à Alep les mêmes images que celles que j’avais vues lors du tremblement de terre en Turquie : des quartiers entiers rasés. Ce n’est pas le cas à Alep. Un certain nombre de maisons se sont effondrées – on m’a dit environ 80. Il s’agit de maisons qui se sont effondrées au milieu d’autres maisons encore debout. Cependant, un grand nombre d’entre elles sont devenues dangereuses, et il est interdit d’y pénétrer. Plus de 100 équipes d’ingénieurs civils ont été organisées pour aller visiter ces maisons. On s’attend à ce que plus de 8 000 d’entre elles soient déclarées dangereuses et doivent être démolies. Ce qui m’a le plus frappé, c’est la peur dans laquelle se trouvent les gens. Les gens sont traumatisés. Ils ont peur de retourner dans leurs maisons. La vie à Alep a été extrêmement difficile ces douze dernières années, avec la guerre, les énormes destructions, le manque d’électricité et de combustible pour chauffer les maisons dans une ville très froide. Il y a peu d’emplois disponibles. Ces deux dernières années, l’inflation a été telle que les gens ne sont pas en mesure d’acheter les produits de première nécessité. De nombreux ménages n’ont pas mangé de viande ou de poulet pendant plusieurs semaines. Cependant, ils parviennent à survivre et à espérer des jours meilleurs. Ce tremblement de terre – ou plutôt ces tremblements de terre – les a privés de ce maigre espoir. C’est effrayant à voir.
Après le premier tremblement de terre, vers 5 heures du matin, les gens ont fui leurs maisons et se sont rassemblés sous une pluie glaciale sur les places publiques. J’ai rencontré des personnes qui étaient alitées et ne pouvaient pas quitter leur maison située au 4ème étage. Ils ont partagé leur terreur pendant ce long moment où tout bougeait. Et la terreur qu’ils ont ressentie après le tremblement de terre. J’ai rencontré une jeune employée du JRS, âgée de 19 ans à peine, qui m’a raconté que ses parents avaient fui l’appartement, la laissant seule dans la maison avec ses deux jeunes frères et sœurs et leur vieille grand-mère. Elle m’a raconté comment elle a surmonté sa peur et fait sortir ses frères et sœurs et sa grand-mère de la maison, toute seule. Une autre employée du JRS m’a raconté que son oncle avait survécu au tremblement de terre et s’était rendu chez sa fille. Le matin, il est sorti dans le jardin, mais il a été tué par un morceau de maçonnerie tombé du toit. Tout le monde avait des expériences de ce genre à raconter.
La solidarité à l’œuvre
Les églises et les mosquées ont ouvert leurs salles pour abriter les milliers de personnes qui avaient quitté leurs maisons. L’église orthodoxe grecque de St Elias a accueilli plusieurs centaines de personnes dans sa salle paroissiale depuis lundi dernier. Les salles sont chauffées et des générateurs fournissent l’électricité. L’église donne trois repas par jour à toutes les personnes qui y séjournent, qu’elles soient chrétiennes ou musulmanes. La mère d’un de nos jésuites qui a passé 6 jours là-bas m’a dit combien il était réconfortant d’être avec d’autres personnes, dans un endroit où la chaleur et la lumière étaient fournies. De nombreuses associations locales fournissent une aide d’urgence et reçoivent des dons de la Syrie elle-même.
Les 4 jésuites qui résident régulièrement à Alep vont bien. Comme pour le JRS, les premiers jours ont été consacrés à prendre soin du personnel et à répondre à leurs besoins immédiats. Michael, en régence, travaille avec le JRS et était avec eux dès le début. Alvaro était en contact avec les étudiants universitaires qui viennent étudier dans notre « zone d’étude » et au CJF. Il a trouvé un logement pour le seul étudiant qui n’avait nulle part où aller. Ces activités reprennent aujourd’hui. Le Frère Michel a fait un suivi avec les membres de la Communauté de Vie Chrétienne (CVX) et leurs familles. Ils voient comment aider eux aussi. J’ai rendu visite à Mgr Audo dimanche après la messe pontificale dans sa cathédrale. La cathédrale n’a subi que de légers dégâts qui sont facilement réparables. Mike Kassis, régent à Damas, se trouvait également à Alep pour ses examens universitaires ; lui et sa famille se portent bien.
Le soutien des jésuites localement
La réponse immédiate et rapide me semble adéquate. Cependant, nous sommes dans une crise à moyen terme où il faut trouver un logement pour des milliers de personnes – dans une ville qui est déjà dans une crise à long terme. Le JRS prépare sa réponse dans cette optique. Ils ont déjà repris leurs services dans les zones où ils sont présents : Hullok, Sahour et Midan (St Wartan) où ils fournissent des soins de santé primaires gratuits et reprendront prochainement les activités avec les enfants à Sakhour. Ces activités aideront les enfants à se remettre de l’impact du tremblement de terre. En coordination avec le Croissant Rouge Syrien, ils proposent d’augmenter le service médical pour inclure plus de personnes. Ils prévoient de réaliser des évaluations des besoins et de la vulnérabilité dans les 8 abris d’urgence présents dans les quartiers dans lesquels ils travaillent afin de mieux préparer les services qu’ils pourraient fournir.
J’ai quitté Alep impressionné par le courage de mes frères jésuites et par le travail accompli par le JRS dans cette situation extrêmement difficile. Avec leur effectif d’environ 140 personnes ici à Alep, ils ont les capacités nécessaires pour mener à bien ce travail.
A Homs, l’aide des jeunes
À Homs, les jésuites avaient déjà commencé à aider les nombreuses personnes qui avaient fui Alep et cherchaient un abri là-bas, souvent avec des amis et de la famille. Ils ont organisé la distribution de couvertures et de nourriture cuisinée. Le premier jour, ils ont distribué 70 repas cuisinés. Hier, ce chiffre était passé à 350. Nous faisons beaucoup de travail avec les jeunes à Homs, avec plus de 1000 enfants de moins de 18 ans qui suivent le catéchisme, 400 étudiants universitaires venant pour la formation religieuse une fois par semaine et quelque 170 jeunes enseignant le catéchisme. Nous avons donc un grand réservoir de jeunes hommes et femmes généreux qui veulent aider les secours lors du tremblement de terre. Ils voulaient partir pour Alep. Gerry et Ramez, deux régents à Homs, ont canalisé leur générosité pour aider les personnes qui avaient fui Alep pour Homs. Notre maison à Boustan al Diwan est une ruche d’activité. De nombreux jeunes trient les vêtements et les couvertures, préparent la nourriture à cuisiner et la cuisinent dans notre cuisine sous la supervision du cuisinier de la communauté. Tous sont heureux de pouvoir faire quelque chose pour aider. C’est merveilleux de voir comment, après cette catastrophe, des communautés entières se sont rassemblées pour aider, certains donnant des couvertures, d’autres des vêtements, d’autres encore apportant de la nourriture à partager. Des gens qui n’ont rien ou presque rien donnent ce dont ils ont besoin à ceux qui ont moins. Gerry a été détaché au JRS pour les trois prochains mois afin de poursuivre ce travail important à Homs. »
P. Michael Zammit Mangion sj, Provincial du Proche-Orient
Prier pour les victimes du séisme
Prie en chemin nous propose une médiation audio à partir du psaume 12, afin de prier pour les victimes du tremblement de terre.
« Nous pensons à tous les habitants des régions touchées par le séisme. Les morts, les blessés, leurs familles. Toutes les populations qui ont peur, qui ont froid, qui souffrent et qui sont dans l’attente de voir leur situation se stabiliser. Je me tourne vers Dieu pour faire résonner ce psaume comme mon appel. »
Pour faire un don :
- Turquie – Plus d’informations et liens pour les dons.
- Syrie – Plus d’informations et liens pour les dons.