Synodalité en pratique locale
En octobre 2021, le pape François a convoqué un synode sur le thème « Pour une Église synodale : communion, participation et mission ». Pendant deux années, toutes les communautés sont invitées à la réflexion sur l’avenir de l’Église. Répondant à l’appel du pape, des groupes ont un peu partout engagé un processus d’échange. Le P. de Charentenay sj partage le fruit de ce travail de « synodalité en pratique locale » à Saint-Ferréol, à Marseille.
Dès sa convocation, le synode a été présenté comme un processus, fondé dans la tradition par la pratique des communautés primitives et renouvelé dans les documents du concile Vatican II, notamment le document sur l’Église, Lumen Gentium. L’ensemble du peuple de Dieu est convoqué pour exercer « le sacerdoce commun des fidèles ». La coresponsabilité du peuple de Dieu et le sensus fidei (ndlr : sens de la foi ou flair des fidèles dans le domaine de la foi) qu’il détient invitent à écouter les communautés. L’esprit de communion doit permettre d’inclure tous les baptisés dans cette étape de la vie de l’Église.
Un esprit synodal
Le pape François a insisté sur l’écoute mutuelle nécessaire pour parvenir à cette synodalité. Tous les sujets concernant la vie des baptisés, la structure de l’Église et de son gouvernement doivent être abordés. « Se mettre à l’écoute de l’Esprit », entendait-on partout.
De multiples documents ont largement expliqué le but de ce synode sur la synodalité. Encore fallait-il que les baptisés les comprennent et se les approprient afin d’y participer. C’est pourquoi nous avons constitué à Saint-Ferréol, sanctuaire du Vieux-Port de Marseille confié à la Compagnie de Jésus, un groupe de travail pour tenter de comprendre ce que tous ces discours pouvaient signifier.
Il est très vite apparu que beaucoup ne voyaient pas trop ce qui se profilait derrière ces mots savants. Il importait de savoir ce que représentait ce projet de synode. Où voulait-on en venir ? Quelles applications concrètes pouvait-on envisager avec ce processus ?
Une pratique locale
Ce groupe d’une petite quinzaine de participants s’est attelé à répondre au questionnaire envoyé en septembre 2021 à tous les baptisés du monde. Ces questions avaient l’avantage d’être très ouvertes dans la diversité des sujets abordés et de permettre une discussion sur les manières de faire locales.
Après plusieurs séances de travail, nous avons pu envoyer une synthèse de ces débats au diocèse de Marseille. Qu’en ressort-il ? D’abord une ignorance assez générale des fonctionnements ecclésiaux. Comment s’exerce l’autorité dans l’Église ? Qu’est-ce que signifie être coresponsable dans la mission ?
Ensuite, une vigoureuse contestation de certaines manières de faire : donner la parole et l’autorité aux clercs, souvent en utilisant les laïcs, au pire en les ignorant. Qui demande l’avis des baptisés pour la nomination d’un évêque ou d’un curé ? Des paroisses se retrouvent parfois avec un prêtre qui ne les comprend pas et qui leur impose ses manières de faire. Certes, ce n’est pas toujours le cas, mais chacun pouvait donner l’un ou l’autre exemple caricatural de ce qui fait souffrir bien des baptisés.
Au-delà de la prise de conscience d’une difficulté à être entendu dans une paroisse ou un diocèse, il convenait de faire des propositions concrètes qui soient praticables, pour éviter d’en rester à des vœux pieux ou des envolées théologiques abstraites. Il est apparu qu’il serait souhaitable que les instances de consultation, comme les conseils de laïcs, soient vraiment prises au sérieux autant au niveau paroissial que diocésain. Elles peuvent être un lieu d’une véritable pratique de la synodalité, pour répondre à l’appel du pape.
Synodalité à l’écoute… : témoignage du P. Tommy Scholtes sj, préfet de l’église Saint-Jean Berchmans à Bruxelles
La synodalité en pratique, cela se passe comment ? Vous invitez 750 personnes par le Bonjour, la lettre hebdomadaire de l’église. 30 personnes répondent présent la première fois, 20 la seconde. Qu’en sera-t-il pour la troisième ? Tour de présentation rapide. Les visages se découvrent sans masque. Oui, on s’est déjà vu, voire parlé. « Mes raisons d’être heureux(se) ? Des espoirs ? Des rêves ? Comment les réaliser ? » sont évoqués. Mais encore : « Comment mieux se connaître ? Mieux se former à la foi ? Ou mieux s’impliquer dans les services, l’animation des enfants, l’accueil de familles de réfugiés ? » Mais la plupart des fidèles présents ont les cheveux légèrement teintés de gris ou de blanc… Les plus jeunes sont pris par leurs familles et activités diverses. Ils se rencontrent, certes, mais entre amis de la même génération. La réalisation des rêves ne risque-t-elle pas de retomber sur les mêmes ? Comment cheminer et avancer ensemble ?
Dossier spécial « En vue du Synode sur la synodalité »
Le Synode sur la synodalité dans l’Église s’est ouvert en octobre 2021 et se conclura en 2023. Pendant deux ans, l’Église est invitée à un temps d’écoute, de dialogue et de discernement afin de mieux répondre à sa mission d’annoncer la Bonne Nouvelle de Jésus-Christ au monde entier. Cet évènement concerne tous les chrétiens : fidèles laïcs, clercs et personnes consacrées. Les jésuites et la famille ignatienne présentent dans ce dossier des éléments qui peuvent nous aider à nous engager sur ce chemin synodal. > Lire le dossier
Quelques rappels :
› Septembre 2021 : phase préparatoire
› 9-10 octobre 2021 : ouverture du synode
› Octobre 2021 – 15 août 2022 : phase diocésaine
› Septembre 2022 : instrumentum laboris 1
› Septembre 2022 – mars 2023 : phase régionale
et continentale
› Juin 2023 : instrumentum laboris 2
› Octobre 2023 : synode et document final
P. Pierre de Charentenay sj,
Communauté Notre-Dame des Missions
Cet article a paru dans la revue Échos jésuites (été 2022), la revue trimestrielle de la Province d’Europe Occidentale Francophone. L’abonnement, numérique et papier, est gratuit. Pour vous abonner, merci d’envoyer votre mail et/ou votre adresse postale à communicationbxl [at] jesuites.com.